Face aux événements en cours au Sénégal, la CCEDEAO n’est que confuse, ne sachant plus comment elle devrait réagir pour contrer la pandémie de coups d’État qui sévit dans l’espace francophone de l’organisation régionale. C’est comme si les dieux du Sahel, pour mettre à l’épreuve la CEDEAO dans ses incohérences, en attendant que d’autres cas ne surviennent, lui offrent cet autre cas qui finira par le discrète définitivement. A la suite de la déclaration du Président sénégalais annonçant le report sine die de l’élection présidentielle dans son pays , alors que le monde entier en est bouleversé, craignant pour cette vieille démocratie de l’Afrique francophone , la CEDEAO , toute honte bue , ne sort qu’un communiqué laconique dans lequel elle semble prendre acte du report, se contentant juste de demander au président sénégalais qui est un membre du syndicat , sa préoccupation , espérant que les conditions seront créées pour que l’élection ait lieu dans le pays .
La peur de l’échec…
Tout le monde a compris, parce que son poulain choisi ne fait pas l’unanimité au sein de sa propre majorité face à une opposition prête à en découdre avec le système Sall, que le sort de son candidat est désormais scellé, les sénégalais aspirant à un réel changement depuis que leur président devenu impopulaire commençait à louvoyer la vieille démocratie sénégalaise.
C’est d’autant intrigant que cela permet de comprendre que ce sont les mêmes farceurs qui se réunissaient au sein de la CEDEAO pour ne jamais défendre des valeurs au sein de la communauté si ce n’est leurs seuls intérêts. A présent l’on peut comprendre, dans le projet qu’il a de confisquer la démocratie sénégalaise, qu’il fasse l’un des plus durs contre les coups d’État, une attitude bien calculée pour espérer, lorsque cela lui arrivait, avoir la même solidarité des pairs et les mêmes intransigeances de la France pour défendre son fauteuil menacé qu’il voudrait céder, par un jeu de chaise musical, à son obligé. Il est dommage que la CEDEAO, même après ce qu’elle à vécu au Niger, au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, ne puisse pas lire aujourd’hui dans ce que manigance le président sénégalais, un coup d’État contre la Constitution ?
Comment ne pas le dire, quand sous Wade, jouant à l’Opposant intrépide pour un pouvoir qui faisait tant saliver, l’on lui ramené aujourd’hui à ses souvenirs , comme rattrapé par l’Histoire , ses anciens posts laissés sur les réseaux sociaux où , jouant à la radicalité, il avait ces mots durs pour ameuter le peuple du Sénégal : « Je vous invite également à veiller au respect scrupuleux du calendrier républicain en rejetant catégoriquement tout projet ou tentative de report de l’élection présidentielle « . Pourquoi, peut-il, en cette époque, ne pas comprendre un report et vouloir trouver une excuse aujourd’hui pour se le permettre, au nom d’arguties qui ne peuvent tenir quand on sait que c’est lui qui a joué à torpiller leur démocratie, à exclure des candidats potentiels du jeu? Est-ce donc lui qui doit décider de quoi diriger les Sénégalais ou les Sénégalais eux-mêmes? Une fois au pouvoir, l’on ne reconnait plus nos hommes politiques. Il va plus loin dans ses extrémismes politiques quand il dit : « La confrontation avec le pouvoir est inévitable et l’armée devra prendre ses responsabilités aux côtés du peuple ». Et il en a eu pour son compte car, aussitôt après sa déclaration, la rue a été envahie et des voix indignées se sont élevées, y compris dans son camp, pour dénoncer son jeu malsain. Aujourd’hui, peut-il comprendre, dans un contexte similaire, que ses adversaires, ainsi qu’il le fit à Wade, appellent à l’insurrection notamment quand il disait, pour mobiliser la rue contre le régime de l’époque : « J’appelle tous les militaires républicains et les Sénégalais soucieux de l’avenir de notre pays et de nos institutions de venir nous rejoindre dans la rue pour faire cesser le processus de monarchisation du Sénégal. L e combat contre le régime se fera dans la rue » ? L’arroseur d’une époque, doit-il être arrosé aujourd’hui ? Sans doute qu’en suivant les mêmes logiques, et ca la CEDEAO doit le comprendre en choisissant d’être du coté du peuple non du potentat qu’est devenu Sall , l’institution doit s’imposer une intransigeance vis-à-vis du sieur Macky Sall ainsi qu’elle l’a été avec d’autres putschistes du même espace. La démocratie sénégalaise ne mérite pas ce que le président sortant lui fait vivre. Le désordre s’installe ainsi dans le pays, avec ces violences qui se déchainent dans les rues et où on peut entendre des manifestants crier : « rien ne nous arrêtera! ». Oublie-t-il qu’il a en face de lui le même peuple qu’il invitait dans la rue pour manifester contre Wade ? Ces arrestations de manifestants et de personnalités de haut rang ne feront qu’envenimer la situation et il n’est pas certain que le Sénégal s’en sorte. Et lui-même.
L’Assemblée Nationale du Sénégal a voté contre le report annoncé l’élection présidentielle par Macky Sall , le Président sortant ,avec 100 voix, contre 40 pour et une abstention . Ce qui , peuvent relever les observateurs, est camouflet pour le président sénégalais qui se gondwanaise depuis quelques temps , quand s’inspirant de l’école d’Issoufou Mahamadou ,il a cherché et inventé des ennuis judiciaires à son adversaire qui a le vent en poupe et qu’il craignait plus depuis qu’il ne voyait , pour l’exclure de l’élection , que isolement comme Issoufou le fit dans son pays à son adversaire ,sourd à tous les appels , notamment ceux des Ulémas , de l’assemblée nationale , de certains ténors de sa majorité, et des intellectuels du pays de la Téranga .
C’est triste. Et forcement, alors qu’il en est si proche, Macky Sall sortira par la petite porte de l’Histoire. Ce qui se passe au Sénégal est gravissime, quand même l’on entend ici et là que quelques déclarations hypocrites, moites de la part de partenaires complices.
Le silence assourdissant de la France…
Il n’est qu’étonnant de constater le silence de la France et d’Emmanuel Macron qui, on l’imagine parce qu’il pourrait penser que, si le candidat de son valet perdait l’élection, il perdrait le contrôle de cet autre pays pour en rajouter à ses malaises, pourrait conseiller nuitamment au président sortant de prendre le contrôle du processus pour ne pas perdre la face et pour que le Sénégal, comme les États de l’AES, ne bascule pas vers la Russie, bête noire de la France. C’est à juste dire que beaucoup d’observateurs voient, derrière ce qui se passe au Sénégal, une main de la France. Comment comprendre que, dans une situation très limpide où on vient manipuler les règles du jeu, la France ne trouve rien à dire qu’à demander aux « autorités à lever les incertitudes autour du calendrier électoral pour que les élections puissent se tenir dans le meilleur délai possible », oubliant que « son » ami est en train justement de torpiller les règles. Quand la France parle de « meilleur délai possible » cela veut dire qu’elle a déjà acceptée le report, attendant une nouvelle date qui puisse leur permettre de reprendre en main une situation qui allait leur échapper, elle et ses amis sénégalais. L’UE ne dit pas mieux. Comment pour des protagonistes qui sont déjà dans l’affrontement, l’UE, comme l’Union Africaine, ne trouve à dire qu’à demander aux « acteurs à œuvrer dans un climat apaisé », sachant que le climat, justement s’enflamme dans le pays? Est-ce sérieux, cela ? Quant à l’impuissante CEDEAO, comme si, encore une fois, elle est dépassée par les évènements, elle ne s’en tient qu’à exprimer sa vive préoccupation, ne pouvant même pas menacer d’aller mettre l’ordre avec sa « force en attente » dans un pays qui se met à feu et à sang. Cette CEDEAO, peut-elle être sérieuse et respectable ? Les sénégalais doivent le savoir aujourd’hui. Il n’est pas exclu que, dans ce pays, comme on l’entend depuis peu au Bénin, des voix se lèvent pour demander la sortie du pays de cette organisation désuète. Comment ne pas s’en indigner, quand, comme la France, elle soutient le report, et demande une nouvelle date alors que le peuple dit refuser tout report de l’élection ?
Finalement, pour être raisonnable, il faut ne pas être du pouvoir et c’est Jean-Luc Mélenchon qui, dans un twitte, traduit toute sa stupeur face à toute cette cacophonie et ce désordre au Sénégal provoqué par Macky Sall . C’est dans doute peiné qu’il râle : « Stupeur et désarroi. Au Sénégal, les élections à la date fixée par le Conseil Constitutionnel sont reportées sine die. Solidarité vigilante avec le peuple souverain sénégalais ».
Pendant ce temps, l’intrigant Emmanuel Macron, à l’ombre de l’Élysée, tire sur les ficelles : il n’en a que faire que ce pays brûle ! Et sa marionnette, à ses risques et périls, joue. Avec le feu.