L’ancien président est-il parti pour ne plus revenir ?
Où est passé Issoufou Mahamadou ? Parti depuis le mardi 12 juin 2024 aux Bahamas pour prendre part, a-t-on appris, à un forum, l’ancien président n’a plus donné signe de vie au Niger. Niamey bruit actuellement de rumeurs folles : « Issoufou Mahamadou a été exfiltré sous prétexte d’une participation à un forum » ; « Issoufou Mahamadou a fui » ; « Issoufou Mahamadou a pris la clé des champs », etc. Ce qui est certain, près de trois semaines après son départ, les Nigériens n’ont toujours pas appris son retour au pays. En l’absence de toute réaction officielle tendant à apaiser les esprits, la rumeur publique enfle et empoisonne le climat social déjà délétère. C’est ainsi qu’il n’est pas rare d’entendre dire que ces deux épouses sont d’ailleurs toutes deux avec lui, ainsi que les enfants. Selon diverses sources, Malika Issoufou aurait rejoint son mari alors que Aïssata Issoufou, elle, était déjà à Lomé, dans la capitale togolaise. Si toutes les sources concordent sur le fait que la famille de l’ancien président, à l’exception de Abba Issoufou, détenu à la maison d’arrêt de Filingué, serait réunie quelque part dans le monde, des divergences apparaissent toutefois sur le lieu de résidence. Tantôt ce serait en Turquie, tantôt ce serait aux Bahamas lorsqu’il ne s’agit pas encore de Cuba. Quoi qu’il en soit, Le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (Cnsp) est au pied du mur. Les Nigériens attendent anxieusement de savoir si Issoufou Mahamadou, l’homme qu’ils considèrent à la base de tous les malheurs et tragédies survenus au cours des 13 dernières années, a pu se soustraire ainsi à la justice de son pays. Sur les réseaux sociaux devenus le mur de lamentation des Nigériens, certains n’hésitent pas à accuser directement le Cnsp de complicité et de fuite organisée. D’autres émettent des soupçons et disent attendre quelque temps avant de se faire une opinion sur la question. Annoncé sur les réseaux sociaux être à Istanbul où, en compagnie de son épouse Malika, il a rendu visite à Brigi Rafini, son ancien premier ministre interné à l’hôpital medipol, le pôle médical d’excellence de Istanbul, Issoufou Mahamadou a momentanément éclipsé la cherté de la vie et l’insécurité et ses corollaires. C’est dire que son cas préoccupe les Nigériens qui ne croiront en l’existence d’une justice crédible que lorsque l’intéressé sera jugé et écroué pour son implication dans maints scandales.
Parti peu avant le délibéré de la Cour d’Etat sur la levée de l’immunité de Bazoum Mohamed, Issoufou Mahamadou n’a pas fini d’enflammer la situation dans son pays. Nommément désigné par les proches du président déchu comme étant l’instigateur et le bénéficiaire du coup d’Etat du 26 juillet 2023, Issoufou Mahamadou a bénéficié en tout cas d’une surprenante indulgence, voire de respect et de considération. Il a ainsi bénéficié d’une protection militaire digne d’un chef d’Etat en fonction, de liberté de mouvement sans précédent pour un ancien président dont le régime est renversé par des militaires et enfin, « last but not the least » comme disent les Anglais, il a échappé à toute inculpation judiciaire. Ni le Cnsp ni le Parquet n’ont jugé utile d’incriminer le principal auteur, co-auteur et/ou complice de tout ce que le Niger a subi depuis 2011. L’implantation des bases militaires occidentales et l’expansion du terrorisme au Niger, les détournements de deniers et biens publics, la corruption à grande échelle, etc., ont été des choix délibérés de Issoufou Mahamadou. S’il a ses partisans, recrutés notamment dans la mafia rose qui a saigné le Niger, Issoufou reste toutefois impopulaire au Niger du fait de la gouvernance scabreuse qu’il a instaurée et entretenue pendant plus d’une décennie. Aujourd’hui, les Nigériens sont perplexes. À qui doivent-ils s’en prendre ?
Laboukoye