Sales temps pour les détourneurs de deniers publics
La gestion du PNDS-Tarayya a été, de loin, la plus désastreuse que le Niger ait connue. Plusieurs mois après le coup d’Etat du 26 juillet 2023, les Nigériens avaient eu l’impression d’avoir eu un coup d’Etat inachevé, en tout cas fait à moitié, quand, le nouveau régime, presque indulgent avec la pègre qu’il chassait du pouvoir, peut encore travailler avec des hommes et des femmes de l’ancien système et leurs enfants sur lesquels pèsent souvent de graves soupçons, comme si le Niger manquait d’hommes pour n’avoir que ceux-là à promouvoir. Cela, dans le pays, créait de nouvelles frustrations. C’était des réseaux sociaux, la semaine dernière, que venaient des alertes pour informer l’opinion qu’enfin ça commence à « barder » dans les milieux de l’ancien régime avec des pontes qui sont interpellés pour répondre de certaines fautes de gestion. Les informations, auxquelles l’on a ajouté quelque sensationnel, avaient tout de suite fait le tour du pays et du monde, partagées au moyen d’Internet.
On se rappelle que Bazoum, arrivant au pouvoir, avait compris cette exigence de la part des Nigériens qui attendaient de sa part une prise en main courageuse de tant de dossiers hérités de la gestion de son parti sous son prédécesseur et promettait, sans le pouvoir, de faire rendre gorge à ceux qui ont détourné et volé. Le sacrifice d’un Ibou Karadjé et d’un ministre en fonction, immolés sur l’autel de l’assainissement promis ne servaient que de saupoudrage. Ceux qui étaient traqués ne servaient que de cobayes pour expier si dérisoirement leur gouvernance de ses crimes. Le tapage fait sur ces cas n’avait pas convaincu car, même s’ils peuvent être coupables de fautes de gestion, sans doute qu’à côté d’eux, et dans le système, il y avait pire pour ne pas savoir aller à la traque de ces bandits d’Etat qui infestent le régime. D’ailleurs, Ibou Karadjé peut-il seul faire ce qu’on lui reproche sans qu’il n’ait, à l’interne, quelques complicités et surtout pour faire la même chose plusieurs fois ? L’homme sous les pieds duquel il agit et qui est censé diriger ce pays pour savoir ce qu’il vit, peut-il ne pas savoir ce qui se passe dans son cabinet par des gens qui ont obligation de lui rendre compte ? Dans cette affaire, pour beaucoup d’observateurs, Issoufou ne peut pas être excusable. Il aura manqué à son rôle de chef d’Etat. Alors, quand le coup d’Etat survenait, les Nigériens, naïvement, avaient cru que le moment est venu de leur rendre justice, cela sans faire de la chasse aux sorcières, en faisant payer à chacun ses fautes. Les mois passaient et l’on commençait à douter, et souvent, ainsi qu’on peut l’entendre dans plusieurs conversations, et sur les réseaux sociaux, à se méfier de la transition qui manque de courage à s’attaquer à certains dossiers. Faut-il par exemple penser que l’envoi en prison de certains caciques du régime participe d’une volonté de les protéger d’une possible vindicte populaire pour les isoler en prison le temps que l’ouragan passe, mais tout en leur faisant passer, pour renaitre politiquement, au purgatoire de la prison ?
A-t-on compris les impatiences populaires, pour faire ces interpellations qui ont fait le buzz sur la toile ces derniers jours ? Ces informations, peuvent-elles être réfutables quand, officiellement, aucune presse ne peut avoir le courage de les annoncer ? Servent-elles juste à contenter une opinion devenue méfiante et pessimiste ? Faut-il, pour calmer les esprits, faire, via les réseaux sociaux, peut-crédibles souvent, ces annonces au goût de sensationnel pour faire croire que les lignes bougent ? En attendant d’en savoir plus, et quand quelqu’un, pendant que les banques ne peuvent donner quelques maigres centaines de mille, trouve le moyen de mobiliser et de rembourser le milliard ainsi qu’on le lit sur les réseaux sociaux, il y a des choses à clarifier au peuple. Cela, peut-il être vrai dans un pays où tout le monde souffre du manque d’argent ?
Le renversement des rôles
Ceux qui étaient forts il y a quelques temps, et qui peuvent pour un oui ou non envoyer qui ils veulent en prison, sont-ils en train de vivre déjà le revers de la médaille pour devenir aujourd’hui les nouveaux gibiers traqués qui s’affolent et se plaignent de passer de sales temps qui leur font déjà oublier les temps heureux, faits d’argent facile, qui étaient les leurs il y a quelques temps, alors qu’ils rêvaient de rester , pendant au moins trente ans à voler le peuple et à lui faire subir les cynismes que l’on sait ? On apprend, en tout cas, que bien d’opérateurs économiques, de fonctionnaires et de barons du régime déchu, depuis des jours, seraient dans le collimateur de la Police Judiciaire qui chercherait les moyens de les presser pour reprendre tout ce qu’ils avaient pris au pays. Depuis des jours, autres Boka et marabouts vivent la nouvelle traite, travaillant à détourner la Coldeff – et sans doute Tiani aussi – de ses objectifs. Mais cette magie ne fonctionnera pas. Le Niger, depuis le 26 juillet, 2023 est couvert de prières.
Jusqu’où ira-t-on ?
La question que l’on se pose partout dans le pays est de savoir jusqu’où, dans cette action, le CNSP et son gouvernement peuvent être capables d’aller pour respecter la promesse du Président du CNSP, Chef de l’Etat, le Général Abdourahamane Tiani. S’il est vrai qu’il faudra fouiller toutes les gestions, il reste surtout vrai que l’on ne peut se contenter de menus fretins pour épargner les grands loups pour ainsi laisser impuni le grand crime. Il faut donc, qu’au-delà des fonctionnaires et de quelques gros bonnets qui ne peuvent payer pour tous, que les militaires nigériens au pouvoir aient le courage d’aller au bout du mal en touchant les dossiers les plus emblématiques que l’on sait et pour lesquels l’on attend d’avoir le traitement qui sied.
Le CNSP, face à l’Histoire….
Toute la crédibilité du nouveau régime reste attachée à la conduite de cet aspect de la gouvernance qu’aucun sentimentalisme ne doit entacher. Il faut aller au bout de toutes les affaires quel que soit le niveau d’implication des acteurs, la justice étant égale pour tous dans le même pays, sous les mêmes lois. Si le Niger de demain, que l’on veut aujourd’hui construire, devrait être une réalité, ce sera sans doute quand l’on pourra mener cette action de purification qui débarrassera le pays et son administration de tant de travers et de maux que l’on a trainés depuis des années sans être capable de les combattre. Il n’y a donc aucune raison d’hésiter. Le CNSP et son gouvernement doivent donc se donner les moyens de ce combat pour lequel, visiblement, le peuple reste intraitable.