Quel sera le format du forum national ?
La transition au Niger avance, depuis plus d’un an, dans l’oubli de sa boussole, estiment bien d’observateurs. Pas même les institutions de la transition n’ont été effectivement mises en place, donnant ainsi le beau prétexte d’une probable prolongation raisonnée. Tout est dans l’attente, peut-être aussi, dans l’attentisme. Le peuple croit encore et regarde. Il attend le clignotant qui indiquera la direction vers laquelle l’on va. Mais, pour le moment, on n’a ni conseil consultatif, ni calendrier, ni même tenu le forum national dont on parle, pourtant depuis de longs mois, sans que l’idée puisse se concrétiser, comme si de cette rencontre qui se veut inclusive l’on devrait avoir peur. Et, notamment des grands déballages et de tout ce qui pourrait réveiller les malaises et les malentendus, déjà mal conjurés. Depuis des mois, ça tergiverse, ça se tiendra, ou ça ne se tiendra pas ; mais entre les deux, on entend souvent quelques communiqués qui en parlent, évoquent quelques aspects et disent qu’on est quand même sur la voie. Oui, cahin-caha, la machine avance, laborieuse, quelque peu coincée. Mais, les militaires ont une parole avec le peuple. Les Nigériens ne l’oublient pas. Ils regardent et jugent. Le contrat avec un peuple est sacré.
Cette rencontre est donc très attendue par les Nigériens. Mais qui va-t-elle rassembler ? Avec qui devra-t-elle être tenue ? Beaucoup de Nigériens se posent cette question. Et, il y a celle-là, plus profonde : la classe politique sera-t-elle encore tenue à l’écart, loin de la gestion du pouvoir et, disons, des débats futurs autour de l’avenir politique du Niger et notamment de la redéfinition des choix politiques à faire pour le pays afin de mettre en place une démocratie plus fonctionnelle, moins bavarde ? Une telle option peut-elle d’ailleurs être gérable quand, alors que le régime militaire met en quarantaine les partis politiques – et ils l’auront mérité par leurs comportements qui ont fait le lit à l’enlisement et à l’impasse – au moins le voit-on travailler avec les acteurs de l’ancien régime et dont on ne peut ignorer les identités politiques ? Pourquoi maintenir la logique des ostracismes hérités de l’ancien régime alors que d’autres peuvent mieux aider la transition à s’en sortir ? Pourquoi donc les mêmes ? Ceux qui ont ruiné ce pays peuvent-ils aider à le relever de ses plaies ? Pourtant, le choix de Nigériens moins trempés, moins compromis, plus compétents et lus intègres, était possible quand on sait qu’ils sont nombreux ces Nigériens sans partis politiques et très discrets qui pouvaient mieux servir le pays et la transition et surtout crédibiliser la transition en ce qu’elle ne serait au service de personne d’autre que du seul Niger.
Eviter de tomber dans le piège d’organisations-bidons…
Au Niger, surtout au cours de la décennie écoulée, l’on a vu proliférer une multitude d’associations, de syndicats, d’ONG nationales, d’organisations de la société civile et même de partis politiques dont l’essence alimentaire a complètement pollué l’environnement et dénaturé l’action publique, les uns et les autres, ne se battant sur ces espaces que pour leur seul confort. S’il faut aujourd’hui, mesurer le quota des participations au forum national à l’architecture de ces différents regroupements dont certains n’ont aucune représentativité, l’on est sûr de rater cet autre rendez-vous avec l’Histoire que le Niger voudrait prendre. Pour tromper sur la force humaine qui soutient son système à travers tant d’associations, le régime des socialistes s’est créé de nombreuses structures qui, dans le fait, ne représentaient presque rien, jouant juste sur le nombre sans avoir de bases sociales solides, très ancrées dans le peuple pour se prévaloir d’une certaine représentativité ou pour légitimer ses décisions qui, forcément, devront avoir une portée majeure. On sait par exemple qu’en 2016, tout en s’en flattant, c’est plus de quatre-vingt partis qui avaient soutenu le candidat du PNDS mais tout le monde sait que 80 voire 90% de ces partis ne peuvent pas rassembler plus du millier de votants. Ce ne fut que de l’arnaque pour se donner, en amont, des raisons dérisoires de justifier une fraude électorale.
Ces nombreux regroupements ne peuvent donc pas avoir de plus-value pour le forum national envisagé, du moins si le but est de faire du sérieux et donc de réussir des réflexions de bonne facture de la part d’organisations sérieuses et respectables qu’il faudrait trier pour éviter de s’encombrer de structures-bidons. Mais il y a une autre voie, une autre solution.
Privilégier des invitations personnalisées
Au Niger, tout le monde connait tout le monde. Dans l’ambition de remettre le Niger et sa démocratie sur les rails, il est important que la transition fasse les meilleurs choix qui puissent mettre le pays à l’abri des éternels recommencements. Il faut donc, connaissant les hommes et les femmes de valeurs que l’on a dans le pays, adresser des invitations personnalisées à chacun et à chacune pour les appeler, quand c’est la Patrie qui appelle, à venir conjuguer leurs efforts et leurs intelligences avec ceux des autres, afin de trouver les meilleures voies qui puissent permettre de stabiliser notre démocratie et de la gérer dans la sagesse et le fair-play et surtout de gérer dans la rigueur les ressources du pays afin d’en assurer un meilleur partage, une meilleure redistribution.
Et le peuple veillera…
Ce sont des questions auxquelles les Nigériens attachent du prix, décidés à avoir un œil regardant et vigilant sur la nouvelle marche du pays tout en appréciant chaque décision pour en cerner les différents contours. Les Nigériens ne veulent plus tomber dans les mêmes erreurs et, pour ce, ils voudraient éviter l’éternel recommencement. La voie du sérieux est possible et il faut croire que les Nigériens en ont les moyens pour aller jusqu’au bout de la refondation telle qu’elle a été pensée et voulue, en accord avec un peuple qui a donné son plein accord, quoiqu’il en coûte, pour hâter les mutations souhaitées qui puissent permettre aux Nigériens de mieux vivre, de mieux rêver, et de repartir ainsi, du bon pied.