L’ampleur de plus en plus inquiétante de la mendicité au Niger
La première des choses que l’étranger qui débarque au Niger constate est l’ampleur de la mendicité dans notre pays. Tous les coins de rue, les ronds-points, les mosquées, les services, de partout grouillent des mendiants de tous les sexes et des tous les âges. Le moindre handicap physique est prétexte pour s’adonner à cette activité somme toute dégradante. Le cas de beaucoup de ces mendiants ne s’explique d’ailleurs pas. Il est vrai que la nécessité impose ses lois des fois à l’être humain et l’amène à chercher, coûte que coûte, sa pitance auprès de son prochain pour sa vie. Mais, pour beaucoup de cas, l’on est passé de la nécessité à la professionnalisation. La mendicité est désormais une activité lucrative pour beaucoup, une activité génératrice de revenus. Elle est professionnelle. Il se raconte même que certains de ces ‘’pauvres’’ mendiants peuvent vous faire la monnaie de toute somme d’argent que vous voulez, en pièces. Le plus dangereux est la mendicité des enfants. Jeunes filles et jeunes, innocents, qui doivent être pris en charge, éduqués, en somme protégés par les familles, la société et l’Etat, sont abandonnés à eux-mêmes, dans la rue, contraints de mendier, habillés en haillons, du matin au soir. En ville, comme en campagne où le phénomène est nouveau. Selon plusieurs sources, ils sont utilisés par les adultes pour leur apporter de l’argent. C’est pourquoi ces mendiants, à certains moments de la journée, n’acceptent que l’argent. Comme s’il était exigé, sous menace par quelqu’un, l’employeur. Il y a aussi des enfants qui, d’eux-mêmes, débarquent en ville, avec pour seul objectif de gagner de l’argent à travers la mendicité. Au lieu d’aller à l’école, dans un atelier, un centre de formation, pour apprendre, ou chercher un petit boulot. Chaque matin, toutes les artères qui conduisent au centre-ville des grandes agglomérations, surtout la capitale Niamey, sont empruntées par des dizaines de jeunes enfants, avec leurs petites tasses pour exiger et recevoir l’obole des passants submergés et, parfois, littéralement agressés.
Le Niger : un pays exportateur de la mendicité ?
Non contents de mendier au pays, certains, ils seraient d’ailleurs nombreux, paient des tickets de bus ou même, tenez bien, d’avion pour aller mendier dans les pays frontaliers et certains pays arabes. Ce n’est donc plus la nécessité, mais la recherche du gain facile. Gagner de l’argent sans rien faire. Si ce n’est perdre sa dignité, son humanité. Ce qui est encore plus grave. Des bailleurs locaux seraient derrière ce honteux business. Ils paient le billet ou le ticket ‘’aller’’.En retour, ils sont remboursés, avec intérêt, s’il vous plait. Une véritable industrie de production et de reproduction de la mendicité. Conséquence, l’image du pays est ternie, dégradée. Le Niger donne de plus en plus l’image d’un pays beaucoup plus exportateur de mendicité que d’uranium. Paradoxe insaisissable. Situation intolérable. Comment en est-on arrivé là ? Résultat de la mauvaise gouvernance avec son corollaire de mauvaise répartition des richesses nationales où il y en a qui s’accaparent de tout pendant que d’autres ne voient rien, proscrits et exclus du système. Sûrement. Dégradation des valeurs ? Certainement. Aujourd’hui, les valeurs sociétales de dignité, de fierté, d’honnêteté et d’amour du travail qui étaient reconnues partout dans le monde au nigérien, sont ravalées, foulées au pied pour laisser place à la recherche du gain facile, le gain immérité, le gain sans travail. Que peut devenir une société où, de plus en plus, ce sont les contrevaleurs, le vol, le mensonge, les détournements, l’escroquerie, qui sont cultivées, valorisées ? Gagner beaucoup sans travailler du tout. Et, tout le monde trouve ce fléau scandaleux normal. Est-ce parce que chacun, la famille, la société et l’Etat surtout qui y voient leur échec, y a sa part de responsabilité, donc interpellé ? La question mérite d’être posée.
Des mendiants nigériens expulsés de tous les pays du monde
Ces mendiants, parfois des familles entières, qui squattent les pays voisins et même lointains, sont régulièrement expulsés, de la pire des manières. Sans ménagement. Tous en ont ras-le-bol. Tous ont assez des mendiants nigériens qui inondent leurs pays, leurs villes, leurs rues. Pendant qu’eux se tuent au travail, pour gagner honnêtement de quoi vivre dignement. Des pays comme l’Algérie, le Ghana, le Bénin, la Côte d’Ivoire l’ont déjà fait et, à plusieurs reprises, pour certains d’entre eux. Tout dernièrement, la Côte d’Ivoire, encore, et le Burkina Faso qui a donné un ultimatum aux mendiants nigériens pour quitter le territoire. D’autres pays le font certainement, ou pourchassent quotidiennement les mendiants nigériens sur leurs territoires, dans leurs villes, sans l’annoncer. Les arrêtant, les emprisonnant, sans aucune élégance parce qu’ils n’en peuvent plus. Et le pays, les nigériens, les autorités, les leaders d’opinion, les familles, regardent tout cela avec indifférence, comme si c’était normal. Alors que même l’islam que certains invoquent pour justifier la mendicité encadre rigoureusement l’assistance aux personnes impotentes, indigentes et nécessiteuses. Qui a intérêt à ce que ça continue ? Une société peut-elle se développer alors même que certains de ses bras valides s’adonnent à la mendicité et, ce, ad vitae aeternam ? Que deviendra la jeunesse d’un pays dont une frange importante est utilisée pour mendier ? Ces jeunes qui mendient ou qui sont utilisés pour mendier, sont guettés par toutes sortes de dangers qui peuvent se répercuter sur la société tout entière. Ces jeunes, dont le discernement n’est pas encore mature, peuvent être manipulés, utilisés par les mauvaises personnes pour toutes sortes d’activités illicites et préjudiciables pour l’existence même de la société : gangstérisme, prostitution, pédophilie, terrorisme. La société a le devoir de les protéger en les arrachant à cette pratique. Il faut agir. Et vite.
C’est pourquoi, il faut saluer, vivement, la décision du gouvernement de rapatrier les mendiants nigériens ‘’ de réfléchir sur les moyens d’éradiquer totalement ce phénomène de la mendicité dans notre pays.
BISSO