Après tous les efforts qui sont en cours sur le plan politique, notamment la création de l’AES, le défi sécuritaire et la reprise de la coopération bilatérale et multilatérale avec les pays et les institutions demeurent des enjeux majeurs.
L’atteinte de l’objectif global, en matière de gouvernance, est évidemment l’amélioration du niveau de vie des populations sur les cinq axes économiques et sociaux qui concourent à la stabilité d’un pays et son progrès que sont : l’alimentation ; l’emploi ; la santé ; l’éducation ; la justice. Elle nécessite la mise en place d’une politique de gestion publique qui reposera essentiellement sur l’éthique, en mettant en chantier, concomitamment avec tout ce qui est entrain d’être fait pour une profonde réforme, particulièrement de la gestion des ressources humaines publiques et de la justice.
Pourquoi l’éthique ?
Quelle que soit la pertinence, la qualité d’une vision, et des plans qui en découlent, la mise en œuvre incombera à l’Homme, l’Individu. La réussite où l’échec dépendra indiscutablement de la qualité des ressources humaines.
En adoptant l’éthique comme règle de comportement citoyen, érigée en principe général de conduite obligatoire pour tous sans exception, les dirigeants, les cadres, l’élite, le peuple, en un mot la Nation, le Pays se donnent les moyens d’aller vers le succès.
Le patriotisme doit nécessairement se nourrir de l’éthique. Cela peut paraître utopique pour l’écrasante majorité des politiciens et de certains citoyens, notamment pour ceux dont la spécialité est la combine et la magouille, substantifs que le Petit Larousse définit ainsi : ‘’combine’’ : moyen habile et peu scrupuleux pour parvenir à ses fins ; ‘’magouille’’ : lutte d’influence, série de combinaisons douteuses ou malhonnêtes entre des groupes, des organisations quelconques ou entre des personnes à l’intérieur d’un groupe.
Ce cheminement vers le désastre par les voies tordues précitées de la combine et de la magouille qui a prévalu dans la conduite des affaires de la Nation et de l’Etat, pendant ces dernières décennies dites : « de régime démocratique », n’est pas une fatalité. Il semble qu’il y a des remèdes appropriés pour le prévenir ou le guérir ; on peut en identifier trois : ériger certaines règles éthiques fondamentales en obligations erga omnes (à l’égard de tous) ; subordonner la loi aux commandements éthiques et la fonction de juger au seul droit ; légiférer dans tous les domaines pour imposer aux administrateurs comme aux administrés, des comportements éthiques.
La gestion des ressources humaines publiques :
La politisation de la gestion des ressources humaines décriée par tous les partis avant qu’ils n’accèdent aux affaires est immédiatement reprise à chaque alternance.
L’appartenance à un parti politique, le militantisme, l’ethnie, la région, la proximité avec « les pontes » et décideurs des partis priment. Le gouvernement, étant constitué sur la base d’une alliance de plusieurs partis, le partage s’impose. Il est élargi démesurément pour satisfaire tout le monde, en charcutant (le mot n’est trop fort) des attributions complémentaires, pour ériger des directions nationales en ministères.
Dès lors que le profil et l’emploi ne sont pas en adéquation, l’incompétence apparait irrémédiablement.
Que faire pour atténuer cette dérive, à défaut d’y mettre fin ? Nous savons qu’il existe des textes fort bien réfléchis qui organisent la fonction publique avec un statut général, mais aussi des statuts particuliers pour certains corps.
Il existe aussi des dispositions qui organisent l’entrée à la fonction publique, et un processus d’accès aux responsabilités, sur la base de l’accumulation progressive de connaissances par le biais de la formation continue sur concours d’Etat, d’exercice graduel du niveau déconcentré au niveau central.
Par exemple, pour être secrétaire général, il est tout à fait opportun d’avoir été directeur national ; pour être directeur national, il est tout à fait indiqué d’avoir été directeur régional, ainsi de suite. C’est en cela que la fonction publique est une fonction de carrière. Elle permet l’accumulation progressive de connaissances théoriques et pratiques, gage de conservation et transmission de la mémoire administrative, nécessaire à la dynamique de la gouvernance d’un pays. C’est pour cela qu’il faut laisser le fonctionnaire en dehors de la politique.
Pour ce faire, les mesures suivantes s’avèrent nécessaires : respecter, lors des nominations, le principe de l’escalier dans le grade et dans les affectations ; exiger pour tout agent de l’État la maitrise obligatoire d’une deuxième langue nationale, en plus de sa langue maternelle, participerait au renforcement de la tolérance et de l’identité nationale ; que les affectations excluent la région d’origine du fonctionnaire (du moins pendant les quinze premières années) ; que chaque salarié de l’État dispose au niveau du ministère de la Fonction publique et de son ministère d’origine d’une fiche (version papier et numérique) d’un dossier de suivi de carrière, dont une copie mise à jour permanemment, accompagnant toute proposition de promotion et d’affectation, afin que le responsable (décideur) puisse disposer d’informations fiables et objectives ; les deux fiches (celle de la fonction publique et du ministère d’origine) devant être validées régulièrement par des séances de travail d’harmonisation annuelle qui seront organisées par le ministère de la Fonction publique par rotation avec tous les ministères. Le recensement biométrique des effectifs de la fonction publique constituerait une bonne base de données pour lancer le processus : il faut que les directeurs des ressources humaines des ministères travaillent en harmonie et en parfait parallélisme avec celui de la fonction publique, en mettant à contribution l’outil informatique et l’internet combinés à la gestion des ressources humaines ; que l’on puisse disposer et mettre à jour permanemment toutes les informations sur les effectifs, par agent et collectivement. En somme, une vraie gestion des ressources humaines, technique managériale sur laquelle il n’est besoin de nous étendre ici ; chaque poste budgétisé devra avoir une fiche d’emploi, avec les informations minimales suivantes : intitulé du poste, attribution, liaisons hiérarchiques (supérieures et subordonnées), liaisons internes fonctionnelles, liaisons externes, tâches (quotidiennes, mensuelles et annuelles), informations reçues, critères de performance, critères de compétence, etc.
La fiche de fonction est un outil indispensable à tous les stades, qui commence par le recrutement (profil/emploi), la période d’activité (productivité), l’évaluation et la notation (appréciation) et la promotion (récompense).
Il faudrait également que chaque ministère dispose d’une pyramide des âges actualisée en permanence, selon la catégorie et les effectifs, pour asseoir une saine gestion prévisionnelle : programmation des mises à la retraite, de promotion, de mise en formation et de recrutement.
Abdoulkarimou MOSSI,
Auditeur Interne/Consultant International
(A suivre)