Une épée de Damoclès sur la tête d’Issoufou Mahamadou ?
Le 14 juin 2024, la Cour d’État a finalement levé l’immunité de Bazoum Mohamed, ouvrant ainsi le boulevard conduisant à son procès. Un boulevard ? Rien n’est moins sûr. Certains observateurs parlent plutôt de chemin escarpé, c’est-à-dire raide et difficile d’accès. Poursuivi pour haute trahison, Bazoum Mohamed, avec les multiples chefs d’accusation avancés contre lui, ne peut échapper à une condamnation lourde s’il est jugé. Connexions avec l’étranger, mettant en péril des intérêts du Niger, connexions avec les groupes terroristes, etc., les charges, tout autant que les preuves dont dispose l’État du Niger, ne lui laissent aucune chance. Pour mémoire, Bazoum Mohamed lui-même a révélé, en février 2022, que pour la paix, il a fait libérer des chefs terroristes qu’il a immédiatement reçus au Palais. Une déclaration fracassante qui a fait l’effet d’une bombe au sein de l’opinion nationale, depuis longtemps convaincue que la propagation du terrorisme est due à l’existence de réseaux de connivences insoupçonnés au sommet de l’État. De nombreux témoignages de citoyens dépouillés de leurs bétails enlevés, de leurs greniers brûlés et chassés de leurs terroirs, rendent comptent de l’extraordinaire facilité avec laquelle les terroristes opèrent.
« Ce procès contre Bazoum Mohamed est une boîte de pandore », confie un observateur. Pour vrai, ce procès est celui du régime de la 7e République, Bazoum Mohamed n’étant qu’un des acteurs qui ont ruiné le Niger. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nombre de Nigériens estiment que ce procès n’aura jamais lieu. Est-il possible de juger Bazoum Mohamed en ignorant royalement qu’Issoufou Mahamadou est l’alpha et l’oméga de ce qui est reproché à son poulain ? Que ce soit sur la question du terrorisme ou de la prédation des deniers publics, pour ne pas parler des connexions avec l’étranger pour gruger le Niger, Issoufou Mahamadou est perçu par les Nigériens comme le champion. C’est pourquoi, bien loin d’être des partisans de Bazoum Mohamed, les Nigériens sont toutefois peu enthousiastes de savoir que l’immunité du président déchu est levée. La perspective ne les enchante pas tellement, l’affaire laissant un arrière-goût amer d’une justice à double vitesse. La justice nigérienne va faire passer, selon toute probabilité, Bazoum Mohamed à la barre alors qu’Issoufou Mahamadou est libre, tranquille et serein.
Comment se fera ce procès ? Sera-t-il ouvert à tous ceux qui désirent le suivre ou fermé à un public trié sur le volet ? Sans aller vite en besogne, il est utile de rappeler que les conseils de Bazoum Mohamed ont souhaité rencontrer leur client et échanger avec lui, un droit absolu qu’on ne saurait leur refuser, ont-ils déclaré. Ils n’ont pas obtenu ce droit, d’où leur retrait de la procédure. Va-t-on alors laisser Bazoum lui-même, connu pour être prolixe, parler lors de son procès ? La question vaut son pesant d’or. Selon de nombreux observateurs, Issoufou Mahamadou serait nécessairement éclaboussé. D’où le scepticisme de certains d’entre eux qui estiment que ce procès n’aurait jamais lieu.
Laboukoye