Quand les représentants du peuple bouffaient l’argent du peuple
Nos députés nationaux sont des bouffeurs. En gros ruminants, ils mangent toute l’herbe verte des prairies, ne laissant aux petits ruminants que des terres ravagées, tristement désertiques, où ils doivent se contenter du néant car bons seulement pour brader leurs votes aux spéculateurs des voix du peuple. C’est le nouveau commerce, le nouveau commerce de nos hommes politiques qui enrichit vite tout, n’ouvrant jamais de boutiques, abusant des principes de la démocratie, louvoyant l’idéal démocratique. Au Niger, sous la défunte Renaissance, personne n’est finalement propre. Tous, même ceux qui sont censés représenter le peuple d’en bas, se faisaient tailler quelque place de confort dans l’ancien système corrompu, se laissaient aller aux mêmes dérives, aux mêmes pratiques et, comme dirait un autre, pendant que le peuple broie, lui, du noir, l’on peut entendre une voix de nulle part qui crie : « silence on manze ». Et on a manzé gros et doux. Les députés s’engraissaient de notre misère. Quand la distribution est bien faite de sorte à arroser tout le monde au parlement, l’on comprend qu’il n’y ait plus d’opposition, de voix discordantes pour décrier la mal gouvernance. Notre classe politique est-elle si pourrie, si insouciante des problèmes du pays ? La question gêne, mais elle s’impose à nous comme le courage que nous pourrions avoir à nous regarder, et, bien entendu, à faire notre mea-culpa. Il nous faut un nouveau type de Nigérien.
On savait qu’à l’Assemblée nationale, au niveau donc de ceux qui sont censés représenter le peuple, de se rendre solidaires des souffrances du peuple très souvent éprouvé, l’on n’avait plus rien à défendre pour ce peuple, abandonné à lui-même. En effet, dans cette chambre qui est devenue une caisse de résonnance de l’exécutif, un studio d’enregistrement pour un pouvoir qui s’est débrouillé au moyen d’élections truquées à avoir une majorité godillot, assez servile, pour n’avoir qu’à appliquer mécaniquement les injonctions reçues de l’exécutif, l’on a joué au Wassosso auquel s’étaient adonnés presque tous les députés quand, stratégiquement – et on l’imagine que c’est pour acheter la bouche des opposants bavards – l’on a taillé un certain confort à chacun afin que de tels privilèges les corrompent pour n’avoir plus à se plaindre de leur propre sort même de député opposant et sans doute aussi de la gouvernance du pays. Et l’adage selon lequel « la bouche qui mange ne parle pas » n’a jamais été aussi vrai.
Entre abus et irresponsabilité : entre faux et usage de faux…
De la même façon que les Nigériens attendaient un audit de certaines structures pour en révéler les grands maux de la gestion précédente, beaucoup d’autres s’attendaient à voir révélés aux Nigériens les dessous de la gestion du parlement nigérien qui est lui aussi un haut lieu d’intrigues et d’affairisme où, en légalisant la fraude, l’on a trouvé les moyens de contenter chacun et ainsi empêcher que les plus bavards ne parlent trop. On apprenait depuis longtemps qu’il y avait un système assez rodé par lequel l’on avait réussi à « voler » des fonds au moyen de missions parlementaires qui, dans la réalité, n’ont jamais été faites. On laissait aux heureux orpailleurs du parlement qui y piquaient des pépites de fournir des justificatifs de missions fictives pour contourner un bureau dans les mêmes couloirs de l’Assemblée et aller « récolter » la belle moisson. Ils sont nombreux à en bénéficier car, à tous, à l’exception de quelques rares députés qui avaient refusé de jouer au Jackpot, ne pouvant, au nom de leur moralité, commettre une telle gaffe qui n’honore pas un représentant du peuple, avaient été trempés dans de telles pratiques que la Renaissance venait conceptualiser.
Pire, l’Assemblée qui réussissait au moyen de ses textes élaborés sur mesure pour s’octroyer des privilèges exorbitants, avait ainsi réussi à distribuer de l’argent à tous, et par pareil comportement de sa part, l’on ne peut que douter des combats que pouvaient mener certains des acteurs politiques de l’échiquier : ils n’ont aucune conviction si ce n’est de s’engraisser, de s’enrichir au su et au vu de tout le monde. Comment peut-on comprendre ces avantages ostentatoires que les députés s’octroyaient dans un pays qui était quand même, à l’époque, le dernier de la planète par l’Indice du Développement Humain (IDH) ? Quand ils arrivent au parlement, leurs voitures ne sont plus de mode et il faudrait les aider à en acquérir de nouvelles pour leurs fantaisies et leur extravagance. Et, ils ont bouffé eux qui pouvaient déjà avoir des véhicules ! Dans nos pays, on aime rendre les riches encore plus riches et les pauvres plus pauvres.
Pourtant, on apprend que tous les membres du bureau de l’Assemblée avaient bénéficié d’un véhicule TOYOTA PRADO neuf, acheté sur les crédits de fonctionnement de l’Assemblée nationale. Que c’est doux d’être député national au Gondwana ! Même les intersessions sont grassement payées. Quel beau Niger très doux ! Ah, Renaissance, que tu auras bien servi tes hommes ! Quelle démocratie foutue que celle-là qui venait creuser les inégalités ?
Le CNSP et son gouvernement ont du pain sur la planche. Quand les Nigériens se lamentent des mollesses du nouveau régime, c’est qu’il y a de quoi : il faut rendre justice au peuple inquiet de ne plus comprendre souvent le changement qu’on a cru avoir depuis le 26 juillet 2023. Et c’est possible, le Général Tiani l’a promis : il a dit qu’il ne protégera personne.