Les élus locaux bientôt débarqués
Pourquoi les militaires, après leur irruption sur la scène politique, laissaient les maires et présidents de conseils en place travailler comme si de rien n’était. Ceux qui eurent le sursis jubilèrent, heureux de continuer à « grignoter », souvent à continuer la prédation alors qu’ils n’ont que faire des conditions de vie et du cadre de vie des populations. Comme beaucoup d’autres Nigériens, nous l’avions déjà dénoncé à son temps,affirmant ne pas comprendre, depuis que le CNSP dissolvait les institutions de la République, et qu’il suspendait la Constitution de la 7ème République, les raisons objectives, défendables d’un point de vue du droit et ce depuis qu’il n’y a plus de constitution en vigueur dans le pays, le maintien à leur poste des élus locaux et notamment des maires et autres présidents de conseils régionaux. Par le seul fait que les dernières élections, sur toute la ligne, étaient décriées par le fait que ces mairies sont tenues en majorité, au moyen d’élections truquées,l’on peut comprendre que ces municipalités n’aient pas cette faveur. Tout le monde sait que le parti qui était au pouvoir et que renversaient les militaires, avait, pour les Nigériens, une telle position sur l’échiquier sans le mériter et pour ce, ils trouvent qu’il n’y avait aucune raison objective et sérieuse qui puisse justifier un tel choix qui cachait mal d’ailleurs les accointances soupçonnées avec certains milieux du nouveau pouvoir militaire.
D’ailleurs, le nouveau régime s’en était rendu compte, depuis que voulant, à partir de ces niveaux maintenus de la gouvernance locale dominés par le PNDS, choisir les délégués au dialogue national, l’on avait crié au complot, dénonçant des choix partisans qui ne peuvent rassurer les Nigériens. Tout le monde, à l’époque, avait compris que profitant de sa situation, le parti déchu voulait imposer ses hommes, pour dicter au gouvernement et au CNSP, mais d’abord au dialogue national,comment devra fonctionner le Niger de demain. Malgré tout, jusqu’à plus de huit mois, le CNSP a laissé ces entités fonctionner avec les mêmes équipes, ce qui, politiquement, ne devrait pas se justifier si tant est que l’on est venu pour mettre de l’ordre et mettre tous au même pied d’égalité, entendu que la suprématie de l’ancien parti au pouvoir n’était fondée que sur du faux, sur des artifices.
Mais depuis quelques jours, circule sur les réseaux sociaux, un message radio émanant du ministère de l’intérieur, ayant pour destinataires, « Tous Présidents Conseils Régionaux, tous Présidents Conseils de Ville, tous Présidents Conseils communaux, tous Présidents Conseils Arrondissement communaux » et informe « Tous Gouverneurs de Régions et tous Préfets de départements ». Alors que tout est clair à ce niveau, on ne peut pas comprendre qu’il n’en soit fait ampliation qu’au seul gouverneur de Niamey. Cette erreur administrative, peut-elle cacher d’autres desseins inavoués et inavouables, d’autres malveillances ? Les Nigériens sont perplexes. Mais revenons au contenu du message qui, en principe, s’adresse à toutes les entités citées pour ne pas avoir d’exception ainsi que laisse entendre l’ampliation.
De quoi s’agit-il ?
« Le message radio, n°000245/MI/SP/AT/DGAT/D Stop vous demande dès réception Stop de surseoir à toutes dépenses engageant vos collectivités respectives Stop. Exception faite du paiement de salaire Stop. Tout acte contraire à cette instruction expose l’auteur ainsi que les coauteurs et complices à la rigueur de la loi Stop. URGENCESIGNALÉE Stop et fin ».
Questions….
Pourquoi ce message ne vient qu’aujourd’hui seulement ? S’est-on rendu compte de manœuvres sournoises orchestrées au niveau de ces entités ? Ou prend-on enfin la mesure des gestions chaotiques des municipalités ? Ou les deux à la fois ? Ce dont on peut être sûr, c’est que cette décision, même si officiellement ne dit pas les raisons aujourd’hui, reste gravement motivée pour être dictée par un certain nombre de raisons objectives dont a pris connaissance le nouveau pouvoir. Mais, est-ce aussi une manière de demander aux responsables de ces entités de n’expédier que les affaires courantes le temps que l’on en vienne à remercier les différents responsables des conseils pour procéder en lieu et place à la désignation d’administrateurs délégués ainsi que cela avait été demandé depuis les premiers matins du coup d’Etat ? En tout cas,pour nombre d’analystes, l’on ne peut que s’attendre, les jours à venir, à un renvoi des différents conseils qui, nous le disions aussi, n’ontpas de résultats tangibles, car les municipalités n’ont pas réussi à donner plus de perspectives aux populations, à changer leur vie et à leur donner une pleine implication dans la vie de leurs entités. Elles ne peuvent pas voir ce que font les maires et autres présidents de conseils pour changer leur vie. Aussi, contrairement à ce que certains disent, nous nous demandons, nous, de qui vient la décision de ne pas toucher aux conseils élus ? Est-ce donc le choix d’un seul homme, le fait d’avoir laisséces entités fonctionner avec les mêmes hommes et femmes ? Le Ministre de l’Intérieur, peut-il, seul, le décider ? Non. Ce fut, de notre point de vue, un choix collégial, sinon imposé à la transition ? C’est peut-être là aussi que certains voyaient une main de l’ancien président Issoufou Mahamadou. Maintenant, il faut assumer à différents niveaux ce choix qui a été pourtant décrié à l’époque.
Ou, faut-il croire, que qui veut tuer son chien l’accuse de rage ?
Il ne faut pas oublier que, de plus en plus, une grogne monte dans l’opinion, les Nigériens devenant de plus en plus critiques à l’endroit du CNSP dont ils disent ne rien comprendre de certains choix. Quand on sait le nombre important de postes à pouvoir une fois qu’on arrivera à supprimer tous les conseils, l’on peut croire que le CNSP se donnerales moyens de contenter un certain nombre de voix discordantes dans le paysage nigérien qui polluent l’atmosphère politique dans le pays contre un régime qui, malgré le large soutien dont il a été l’objet, peine à maintenir l’adhésion populaire autour de lui du fait de certains choix qui font douter certains Nigériens de sa mission. Déjà, certains, ne peuvent-ils pas saliver à prévoir la suspension des conseils municipaux et régionaux, pour commencer à raser les murs et se faire coopter à occuper une place ou une autre ? Même si l’on sait que la gestion de ces entités n’est pas de l’ordre de ce que l’on peut défendre, l’on peut croire que chasser les maires, peut servir de moyens politiques pour taire certaines voix devenues bavardes et critiques à l’égard de la transition et notamment du CNSP. Sauf que peut-être, il n’aurait pas dû attendre aujourd’hui, et notamment pour un tel motif, pour prendre cette décision si jamais le message radio devrait conduire à cette situation, entendu que, depuis longtemps, les Nigériens décriaient la gestion des maires.
En l’absence de toute explication officiellement faite de ces choix, l’on ne peut que spéculer, le temps que les Nigériens apprennent davantage tant sur la gestion des conseils que sur ce que l’on voudrait faire de ces entités. Devra-t-on encore voir venir, plus de militaires nommés comme on l’a vu dans certaines nominations antérieures qui ont militarisé l’administration ? Les Nigériens attendent pour apprécier. En ces moments de doute, toutest scruté à la loupe.