Après les Assises, quelle marge de manœuvre pour le CNSP sans trahir ?
Le CNSP, tel qu’il l’a voulu, notamment par le format qu’il a dicté, a vu prendre fin les Assises nationales qui ont été un moment très fort où l’opinion nationale s’est exprimée, disant, à travers les conclusions qui en sont issues, tout ce qu’ils attendent du nouveau Niger qui est en train de se construire. Par la ferveur que l’on a vue, et l’intérêt particulier que les Nigériens avaient pour l’événement, notamment quand on voit comment les Assises sont suivies. Ainsi, l’on a compris qu’ils y mettaient tellement d’espoir que le CNSP, et le Général Tiani en tête, ne saurait décevoir pour ignorer tant de rêves légitimes. Le Niger doit changer, c’est un besoin immense de l’époque, car c’est ainsi seulement que le pays pourrait sortir de la misère et des crises interminables.
Aujourd’hui, il faut regarder tous les aspects de ce que le forum a arrêté pour en faire une feuille de route que la transition doit mettre en œuvre afin de hâter les changements attendus par le peuple..
Contexte régional et international favorable
Il n’y a plus à tergiverser, le Niger, ayant un retard à rattraper pour être au diapason des deux autres pays de l’AES, doit aujourd’hui comprendre que, face à la scène désolante que le président Bissau-guinéen offre aujourd’hui au monde, se retournant contre la CEDEAO dont il était pourtant l’un des ouvriers les plus zélés, incapable, comme d’autres de la même espèce et du même espace, de porter la démocratie et de respecter ses principes et ses valeurs, il a une chance unique de refaire l’Histoire. L’acte doit conduire la CEDEAO à se remettre en cause, à aller réfléchir encore à ce qui lui arrive avec, aujourd’hui, nombre de dirigeants qui, même s’ils n’ont pas quitté l’institution, gardent leurs distances vis-à-vis d’elle, méfiants d’une organisation qui a oublié ses principes fondateurs. L’organisation communautaire ouest-africaine, à la vérité, est moribonde. Puis, comme pour ne rien arranger à la situation de la CEDEAO, tout est en train de se gâter pour l’Otan aujourd’hui inquiétée par les positions d’un Trump dont la foi politique reste son America first, n’ayant que faire d’un autre sinon qu’à ne travailler que pour les intérêts américains, pour la seule Amérique qui l’intéresse plus que tout au monde. Comme tout bon chef d’Etat.
Aller vite…
Maintenant qu’on est rassuré qu’on est sur la bonne voie, il faut agir. Et il n’y a plus de temps à perdre. Il est impérieux d’abandonner les nominations PAAC (parents, amis et connaissances), le laxisme, le laisser-aller, et restaurer l’autorité de l’Etat. Mais, comment agir quand on n’a pas les bonnes personnes à la place qu’il faut ? Tant que la transition ne se défait pas des copinages qui ont visiblement prévalu aux choix des hommes où chacun, comme pour partager un butin de guerre, est allé « inviter » le sien, elle ne s’en sortira pas et le Niger s’embourbera dans les mêmes problèmes. Va-t-on continuer à mettre en marge les compétences comme l’avait fait, à ses dépens, la Renaissance dont le label outrageant avait été l’exclusion. Après plus d’un an, la transition doit être fixée sur ses objectifs et, notamment, à savoir qui est bon et qui ne l’est pas. Ceux qui sont allés, après les bilans présentés que tous les Nigériens ont pu apprécier, se faire du marketing sur les réseaux sociaux, usant d’acteurs et d’activistes différents, doivent savoir que cela ne changera rien à leur sort : on juge les actes, non les publicités commandées par lesquelles ils voudraient se faire passer pour des meilleurs alors que tout le monde a vu et a entendu comment ils avaient géré leurs départements. On attend des transformations importantes dans les différents secteurs de la vie nationale, et ce n’est pas, dans bien de cas, ce que l’on voit. Il y en a qui sont allés s’embourber dans la routine facile, et un m’as-tu-vu de mauvais aloi. Que c’est doux d’être ministre, surtout quand, dans un parcours, on ne l’a jamais espéré. On voit bien comment certains s’agitent à ne pas perdre leurs positions. Ce pays a grandement soif de changement, de vie meilleure, d’une autre façon de gérer l’Etat. Mais, comment peut-on y aller quand, souvent, l’on n’a pas les bonnes personnes pour accompagner dans cette marche exaltante ?
De l’urgence de donner enfin une orientation à l’action gouvernementale…
Il est temps aujourd’hui de savoir dans quelle direction on va. C’est pourquoi, dans l’écoute des recommandations issues des Assises nationales, il est important que le CNSP fasse tout le bilan pour donner suite à l’appel d’un peuple qui attend de lui vérité et justice. Il s’agit, par un tel acte, de montrer que le pays a amorcé un nouveau cap et que plus jamais rien ne sera comme avant. Tous les maux doivent être combattus avec fermeté pour que, plus jamais, de tels comportements n’aient lieu. Mais, comment aller au changement souhaité et avoir les transformations escomptées quand l’on doit garder les mêmes équipes, les mêmes hommes qui ont condamné le pays, dans certains domaines notamment, à l’inertie ? C’est pourquoi il urge de changer l’équipe gouvernementale, en renvoyant bien de ministres qui n’ont rien apporté en termes de transformations attendues dans le pays et d’initiatives qui changent en profondeur les domaines qu’ils tiennent. Certainement qu’après cela, au niveau de l’administration, d’autres changements devront intervenir pour apporter du sang neuf à la gestion du pays. On ne peut pas quitter l’inertie tant qu’on devrait rester avec les mêmes acteurs à faire du surplace, incapables d’innovation et d’initiatives pour changer, à perpétuer les mêmes comportements compromettants.
Entre contrat moral et politique avec le peuple et responsabilité historique…
Arrivé à ce stade dans cette aventure qui semble après prendre tout le monde de cours, quelle marge de manœuvre reste-t-il au CNSP pour croire qu’il pourrait jongler pour trafiquer la transition, contre les choix exprimés par le peuple ? Ce n’est que compliqué quand on sait que son lien avec le peuple tient à un seul fil, à savoir la suite qu’il donnera aux conclusions issues des Assises et que tous les Nigériens ont enregistrées dans les consciences pour juger sur pièce une transition qui fait face aujourd’hui à l’Histoire, celle qui doit la célébrer pour la postérité, face aux générations qui viennent ou, si elle ne s’y résout pas, celle qui, hélas, parlera mal d’elle. C’est une chance unique de faire l’histoire et de rentrer dans la légende, celle qui brillera, comme Tombouctou d’une époque, avec ses feux de mille fagots. Les affinités, les amitiés et aucune vieille complicité ne doivent désormais compter. Seul compte le Niger. Et c’est cela seulement que le CNSP et son gouvernement futur doivent considérer pour remettre ce pays sur les deux pieds, à user de leurs mille et une truelles pour la reconstruction du nouveau Niger dont rêvent les Nigériens qui sortent de douze années de brimades et de mépris, de gestion cahoteuse et d’injustices criardes, restées jusqu’ici impunies.
Mairiga