Pourquoi tant de cachoteries ?
C’est le 18 décembre, à l’occasion du 65e anniversaire de la proclamation de la République que le général Abdourahamane Tiani, président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (Cnsp), chef de l’État, a annoncé la tenue prochaine d’un forum national inclusif. Annoncée depuis décembre 2023, la tenue du forum traîne en longueur. L’ardeur née de l’annonce officielle a depuis longtemps été émoussée, le temps prolongé sans que le Cnsp éclaire la lanterne des Nigériens sur cette grande messe ayant été assimilée à un renvoi aux calendes grecques.Bientôt un an depuis cette belle annonce, mais de forum, rien, même si depuis quelque temps, tout laisse à croire que la date desdites assises est proche. Pour le moment, tout se passe dans la plus grande discrétion, les Nigériens, les premiers concernés, n’ayant droit jusqu’ici qu’à des rumeurs et des bribes d’informations fuitées sur les réseaux sociaux. C’est notamment une lettre du ministère des Affaires étrangères adressée aux représentations diplomatiques du Niger à l’étranger et qui renseigne sur l’évolution des préparatifs de ces assises.
Dans cette lettre, il est demandé aux ambassadeurs concernés de prendre toutes les dispositions nécessaires pour mobiliser et faciliter l’organisation dans les meilleurs délais possibles, des assises locales et régionales des membres de la Diaspora nigérienne vivant dans les pays relevant de vos juridictions respectives ». Non seulement la lettre instruit de tenir ces assises dans les meilleurs délais possibles, mais elle indique également qu’elles ne sauraient dépasser un jour. Pourtant, le contenu sur lequel doivent plancher les participants est balèze. Autant dire qu’en 24 heures, il est impossible de dresser un diagnostic, secteur par secteur, et de proposer des mesures de remédiation et de prévention. Encore que, certainement par mesure d’économie, il a été retenu un pays de rencontre pour chaque zone. Les délégués désignés vont, donc, se déplacer de leur pays de résidence au pays-hôte pour 24 heures. Une simple formalité, pas plus !
Les Nigériens pour qui le forum est envisagé risquent d’être de simples applaudisseurs
La discrétion qui entoure la tenue de ce forum inclusif est assez surprenante. Outre qu’elle est anachronique, le général Tiani ayant promis la transparence dans la gestion des affaires publiques, elle est également inquiétante à plus d’un titre. Les Nigériens pour qui le forum est envisagé risquent d’être de simples applaudisseurs d’un projet qu’ils n’auront ni élaboré ni véritablement adopté. Dans les salons feutrés comme dans les fadas, ça parle beaucoup de ce forum et de la manière dont il est préparé, à croire que ce ne sera pas aux Nigériens de le mettre en œuvre. Un observateur qui a requis l’anonymat confie que selon toute vraisemblance les documents ont été apprêtés dans un obscur laboratoire par des individus commis à cette tâche. Pourtant, une vieille sagesse populaire nigérienne apprend qu’on ne confectionne pas le bonnet du phacochère en son absence.
Outre la discrétion inutile et non productive qui entoure les préparatifs du forum inclusif, nombre de Nigériens s’interrogent sur l’identité et la légitimité des délégués qui y participeront. Qui les a choisis et sur la base de quels critères ? Seuls ceux qui sont dans le secret des dieux de la Transition le savent. Or, une date butoir, le 15 octobre prochain, a été fixée pour la transmission des conclusions de ces assises locales. Le 15 octobre, c’est dans cinq jours.
À quand la tenue des assises régionales, au pays
Au Niger, l’on n’a pas souvenance de la tenue d’assises régionales sur la base du programme indiqué aux Nigériens de la diaspora. On ignore encore l’agenda prescrit pour la tenue des assises locales au niveau du pays, mais les prémices annoncées laissent entrevoir des rencontres de simples formalités qui se tiendraient dans les mêmes délais que celles de la diaspora. Quoi qu’il en soit, le forum semble méticuleusement préparé quelque part par des acteurs dont l’identité, par conséquent les desseins, restent inconnus.
Les partis politiques prendront-ils part à ces assises ? Nul ne le sait encore. Ce qui est certain, malgré sa gestion catastrophique du pays pendant 13 ans, avec à la clé des scandales financiers estimés à plusieurs milliers de milliards de francs CFA, le PndsTarayya serait probablement de la partie, ses ténors et militants ne se plaignant pas jusqu’ici outre mesure de la Transition en cours. Des indicateurs qui renseignent sur la complexité de la désignation des délégués. Leur légitimité populaire est une base sérieuse à prendre en compte et les formations politiques représentent un creuset important à ne pas laisser en rade.
Laboukoye