Le syndrome malien va-t-il arriver au Niger ?
L’AES, depuis l’annonce-surprise du limogeage du Premier ministre malien, Dr. Choguel Kokala Maïga, vit des moments de questionnements qui viennent assaillir les populations de l’AES, plongées dans une certaine expectative qui les pousse dans différentes interrogations auxquelles il n’est que difficile de trouver des réponses. Quelques incompréhensions mal gérées ont conduit à cette situation somme toute dommageable à la cohésion nécessaire autour de la transition, et à l’intérieur même du gouvernement miné par des dissensions, chacun ne jurant que par son mentor, préjudiciable aussi à cette union sacrée aujourd’hui fragile qui a permis de faire face aux différentes menaces et notamment à toutes les tentatives de la France, notamment à travers la CEDEAO servile, pour déstabiliser les transitions sahéliennes. Certes, les gouvernements actuels ont montré leurs limites objectives avec souvent des ministres invisibles, peu efficaces, plus versés dans le m’as-tu-vu alors que l’efficacité pourrait se trouver dans la discrétion, et la réflexion féconde menée pour transformer les secteurs dont ils ont la charge, ce à travers les synergies cultivées à l’intérieur des équipes où l’on met toutes les compétences à contribution au lieu de bannir certaines au nom de raisons farfelues, inavouables. La transition, sait-elle franchement ce qui se passe dans certaines entités ? Commérages et infamie. C’est triste pour ce grand Niger avec une administration réduite à des personnalisations inutiles et à des champs de délation où, par des forces dont on se prévaudrait, l’on essaie de détruire d’autres parce qu’ils pourraient ne pas être du bon côté. Depuis, l’éviction des Premiers ministres maliens et burkinabé, les environnements politiques sont mis en alerte, attendant, par les choix partagés et la concertation mutuelle qui se sont imposés à tous dans le cadre de la l’AES, de prendre les mêmes décisions et de vivre les mêmes mutations. Alors que certaines veulent de cette action dans l’objectivité, d’autres ne le souhaitent que pour avoir la tête du Premier ministre qui les dérange par ses rigueurs connues et son refus de la compromission.
C’était dans cette situation qu’intervenait également, comme pour faire écho à ce qui se passait quelques jours plus tôt au Mali, un changement de gouvernement qui a également coûté la tête du chef de l’équipe, emporté par une décision du président de la transition burkinabé, et dans ce deuxième cas, sans qu’on ne sache trop sur les raisons de cet autre limogeage qui renforce les malaises au sein d’une AES qui peut enfin comprendre, sortant de ses euphories et de ses ardeurs, que le chemin reste long. Le syndrome malien est-il donc aux portes aussi du Niger ? Rien ne permet de répondre à cette question. Mais l’expectative renforce les angoisses, démotive les équipes qui vivent l’anxiété d’un limogeage redouté. Pour autant, il ne faut pas croire que c’est pour dire qu’un changement d’équipe gouvernementale serait considéré comme un gâchis. Loin s’en faut. Au contraire, cela fait même des semaines, voire des mois, que les Nigériens en parlent, critiquant les contre-performances de certains départements ministériels ou par l’incompétence de leurs acteurs si ce n’est de leurs leaderships, ou par des contradictions internes, et encore une fois des clanismes qui ont gravement entamé la cohésion nécessaire à l’intérieur des équipes. Comment veut-on avoir des résultats quand, souvent ceux qui sont appelés à travailler ensemble entretiennent des conflits inutiles, ne peuvent s’aimer à travailler ensemble, chacun voulant montrer qu’il est fort, etc., ou soutenu par quelqu’un, suivez mon regard !
Au Niger, le syndrome malien, s’il doit arriver, ne peut qu’être vivement attendu pour permettre à la transition de se donner des cadres, des hommes et des femmes responsables, qui peuvent dépersonnaliser le service public que personne ne saurait gérer comme s’il devaient être « sa chose » pour se choisir ceux avec qui il doit travailler, méprisant d’autres, c’est-à-dire d’en faire un espace où il ne travaillera qu’avec celui dont la tête pourrait plus plaire. Il y a donc si souvent de ces petites rancunes inutiles qui rabaissent les âmes qui ont cultivé dans l’administration, aujourd’hui des climats délétères, souvent constitué des clans, et qui ont cultivé les mêmes clientélismes que les Nigériens ont jusqu’ici dénoncés. On ne gouverne pas pour contenter des clans, pour servir des individus.
Aller à un changement de gouvernement
Dans un tel climat, l’on ne peut qu’appeler à aller à un changement de gouvernement, aujourd’hui nécessaire. Si la transition, et le CNSP en particulier, veulent réussir, ils ne peuvent qu’opérer ces réglages indispensables, voire impératifs. Il est en effet impératif, face à différents flottements et à des situations qui se tassent, face à certaines inerties, dans un pays qui aspire à conforter sa révolution, à faire opérer des ajustements nécessaires. Dans le contexte actuel, il y a à compter sur les hommes et les femmes qui ont la motivation nécessaire, une forte capacité à être de grands mobilisateurs d’énergie et d’intelligence, pour conduire des équipes, à porter des rêves et à oser l’impossible. Peut-on lire dans cette mine d’un Premier ministre qui semble perdre ses enthousiasmes des premiers jours, cette déception de manquer d’hommes et de femmes qui peuvent être capables de forcer un destin, et de construire des destins nouveaux à un peuple à qui le CNSP communiquait le sens du sursaut…patriotique ?
Cette transition, pour le Niger, doit être la bonne et la dernière.