Des embrouilles entre les deux pays ?
La France a échoué à s’installer dans beaucoup de pays francophones qui sont restés lucides à comprendre qu’ils ont plus intérêt à préserver leurs bonnes relations, somme toute séculaires, avec les voisins, qu’à plaire à Emmanuel Macron et à sa France si lointaine qui voudrait se servir de leurs territoires pour assouvir ses visées impérialistes. Mais le président du grand voisin du sud, le Nigéria, ne semble pas comprendre les choses de la même manière dans une géopolitique complexe. Veut-il détruire – et pour quel intérêt ? – la belle histoire des relations fructueuses tissées entre les deux pays pendant des décennies que chacun des présidents, avant lui, s’était évertué à consolider, à renforcer, à affiner ? Pouvait-il être, lui dont le pays ne connut aucun lien colonial avec la France, le meilleur valet d’une Françafrique à laquelle rien ne l’oblige à adhérer ?
Il y a quelques jours, le gouvernement du Niger publiait un communiqué dans lequel il révélait les projets de nuisance du Nigéria qui a fait le choix grave, pour l’Histoire, d’héberger des troupes françaises déclarées indésirables au Niger, désormais installées à quelques encablures de la frontière commune, sous le fallacieux prétexte qu’elles devraient l’aider à triompher sur Boko Haram, alors même qu’elles ne le purent pas au Sahel où elles étaient restées pendant une dizaine d’années qui n’ont servi qu’à aggraver la situation quand, au lieu de combattre l’ennemi, elles se mettaient en intelligence avec lui, lui apportant renseignement, logistiques et moyens de subsistances. C’est dans ce rôle trouble que la France avait été découverte et dénoncée. Le Sahel, de manière responsable avait alors décidé de se débarrasser d’elle pour faire d’autres choix, notamment de la souveraineté par laquelle, il a compris, que l’on ne peut confier sa sécurité à un autre car celle-ci reste de la responsabilité première des politiques, intimement liée à la souveraineté de l’Etat.
Le Niger, dira qu’ « en dépit des efforts de normalisation des relations, il est regrettable de constater que le Nigéria n’a pas renoncé à servir de base-arrière à la déstabilisation du Niger en complicité avec certaines puissances étrangères et des dignitaires de l’ancien régime auxquels il offre un refuse ». En s’accoquinant avec l’ennemi, le Nigéria, ou si l’on veut, Bola Tinubu, ne peut pas rassurer son voisin.
C’est sur la base d’informations crédibles, vérifiables, que le Niger fonde ses accusations et donne le choix au Nigéria de se déterminer face aux enjeux de l’occupation de son territoire qui lui fera, faut-il qu’il le sache, plus du mal que de bien. Car en plus de semer le chaos dans son pays, la présence militaire française au Nigéria, fatalement, portera également un coup dur à la relation entre le Niger et le Nigéria, un vrai gâchis. La convocation par le Ministre nigérien des Affaires Etrangères le 18 décembre 2024 de la chargée d’affaires de l’ambassade du Nigéria au Niger est l’expression de ces malaises nouveaux qui viennent compliquer une situation déjà mal en point depuis que, sous la houlette de son président qui fut président en exercices de l’institution régionale, la CEDEAO décidait de sanctions iniques et inhumaines contre le peuple frère du Niger.
La réponse du Nigéria
Comme il fallait s’y attendre, le 21 décembre 2024, le Nigéria, face à de telles accusations graves préjudiciables à la quiétude entre les deux pays, rétorque à travers un communiqué publié par Kimiebi Imomotimi Ebienfa, porte-parole du ministère des affaires étrangères nigérian. Tout en affirmant être inquiet, le gouvernement nigérian, affirme « fermement qu’il n’y a pas de troupes militaires françaises dans le nord du pays se préparant à déstabiliser le gouvernement du Niger » et donc que « ces allégations sont sans fondement et doivent être rejetées dans leur intégralité ».
Est-ce suffisant pour calmer les esprits ?
Ce dialogue à distance, par communiqués interposés, vient dire à quel point les relations entre les deux pays sont aujourd’hui fragiles, et ce depuis que Tinubu prenait sur lui la lourde responsabilité de faire de son pays le porte-flambeau de l’attaque militaire envisagée, avec le soutien déclaré de la France, contre le Niger comme si le Nigéria pouvait avoir quelques droits à décider pour le Niger de quel président devrait le diriger. Autant le Niger respecte la souveraineté des autres pays, autant les autres doivent respecter sa souveraineté pour lui reconnaitre ce droit à décider pour lui-même.
Le peuple nigérian, et notamment du nord, attaché au Niger par des liens ancestraux et culturels profonds, doit être vigilant pour que, par ses zèles de colonisé recyclé, le président de la République fédérale du Nigéria, ne porte pas un coup fatal aux relations des deux pays et à l’Histoire commune jusque-là sans histoires. L’Afrique, pour se construire ne doit pas accepter que l’extérieur oppose ses peuples pour les pousser à l’affrontement et se fragiliser. Ils ont mieux à faire : c’est faire face aux vrais défis en se détournant des manipulateurs.
Mairiga